jeudi 8 juillet 2010

Peu de rues peuvent se vanter de ne pas me connaître



Amor aka Beck, Keyz, Page, Hoby, Verse, Ters, Alex, Skar, Kert et Leo(Leon?) 3KEF, Sleek, Klor, Azot et Noki ELS, Rage, Disk 4 Hero, Pr...(?), Caep, Smag, Krom, Sark.

Toujours un Sleek qui traîne, et ces nouveaux(enfin nouveaux...)noms inconnus...

Interview Alez



Pas de phrase d'intro le jeudi c'est haram.





Le premier nom que tu aies-vu sur un mur?

Je ne m'en rappelle pas... En fait quand j'ai commencé, je ne m'intéressait pas vraiment à ce milieu. Je voyais le tag comme un truc de faux rebelles, et je faisais plus du tag "second degré". J'écoutais du rock et de la musique électronique, j'étais pas du tout dans le délire ! C'est que plus tard, en pratiquant, que j'ai vraiment accroché et que j'ai commencé à m'intéresser à ce qui se faisait et à regarder les murs.
Au début ce qui m'impressionnait c'était les fresques très travaillées et techniques, à la Frelon ou DVD. Par la suite ça a changé, et maintenant ça ne me touche vraiment plus...


Crois-tu qu'en 2010 la fame est un concept has-been et que comme le veut l'adage "vivons heureux vivons cachés"?

Si on veut vivre caché et qu'on s'en fout de la fame, on ne fait pas du graffiti. Même le fait d'aller faire un terrain, c'est faire la démarche de montrer ce qu'on fait aux autres, sinon on repeint le même mur sous un pont toutes les semaines... Je ne crois pas du tout aux gens qui disent qu'ils peignent pour eux en s'en tapant de l'avis des autres.
Pour ma part si je fais peu d'illégal, c'est plus par flemme ou parce que ce n'est pas très
compatible avec ma vie sociale que par choix. Je fais pas mal de frets maintenant, c'est un autre délire, les pièces durent longtemps, elles sont vues, mais pas forcément par les gens de la région. Et puis c'est une ambiance cool sans l'inconvénient des terrains où les pièces sont repassées trop vite.



Plus largement crois-tu que le pack "tags en rue-panels sur métro-flops sur stores-chromes sur autoroutes" est dépassé et que c'est chacun son histoire, chacun son chemin?

Il est un peu dépassé dans les faits parce que maintenant les gens sont plus spécialisés soit en rue, soit en roulant, soit en autoroutes/voies ferrées. Je ne sais pas trop pourquoi d'ailleurs, c'est peut-être plus dur de faire de tout vraiment à fond aujourd'hui. Le buff dans Lille démotive beaucoup de gens aussi je pense. C'est logique quelque part, faire un pièce sur un store en sachant qu'elle a une durée de vie de 5 ans ou de 5 jours, c'est pas pareil !
Reste que ceux qui m'ont le plus marqué dans le Nord sont ceux qui étaient vraiment multi-supports, comme les VR6.


On entend souvent les gens dire "ouais j'suis vachement influencé par Albert Frankhov, un illustrateur tchèque des années 30 blah blah..."(ndr: pas besoin de googliser il n'existe pas) mais on voit rien dans leurs graffs. Branlette ou réel impact?

Le graffiti a toujours emprunté pas mal au graphisme je pense, même dans les bases (remplissage/contour, lights), sûrement souvent inconsciemment d'ailleurs. On est tous confronté à tellement de graphisme tous les jours à travers toutes les pubs qu'on se prend dans la gueule, ça influence forcément.
Après des influences plus pointues comme tu dis, je sais pas, j'ai jamais vu une pièce en me disant, tiens ça me fait penser à untel précisément. Mais les aller-retours graffiti/graphisme sont de plus en plus rapides, et on voit bien que certains graffeurs regardent de prés ce qui se fait. Par exemple il y a une grosse mode des visuels retro 80's dans le graphisme, et c'est direct repris dans le graff, par Roid notamment. C'est pas forcément négatif, tant que ça se limite pas à surfer sur la mode du moment et qu'il ya un vrai fond derrière. Mais globalement, je pense que c'est plus des univers que des mecs précis qui influence le graffiti, comme les tatouages latinos, la propagande soviÈtique, ... Des genres avec des codes précis qui sont facilement transposables.




Qui pour toi sort des canons traditionnels du graffiti? Donne nous tes bonnes adresses.

Récemment j'ai bien accroché sur le bouquin "Nothing but Letters" de Lek et Yko qui arrivent à innover en restant dans le travail de la lettre, ce qui est pas si courant que ça. J'aime beaucoup WXYZ aussi ou les camions de Alfe où il fait un gros remplissage bien bordélique sur tout le camion et après claque un tracé direct par dessus. Ripo m'a bien scotché aussi y'a pas longtemps, ça change !
Mais ceux que j'apprécie le plus ne sont pas forcément ceux qui essayent de sortir à tout prix des codes du graffiti. Ceux qui arrivent à avoir leur style bien marqué tout en étant super classiques ont d'autant plus de mérite. J'adore Moze, ou CanTwo par exemple. On peut dire que ça apporte rien de nouveau, mais ça reste du beau boulot, bien fait, et ça fait plaisir aux yeux. Après il y a ceux qui gardent les codes classique et arrivent à sortir un truc vraiment nouveau, où c'est les lettres qui font la différence et pas le traité, comme Isham ou Dem, et là : respect !


Ici je ne le répéterais jamais assez nous vouons un culte au cap d'origine et aux tags 20 ans d'âge, crois-tu que nous soyons fous?

Je suis pas spécialement un acro du cap d'origine, en fait je m'en fout un peu des bombes tant que j'arrive à faire le truc que j'ai en tête. Ca m'arrive même de mettre des caps jaunes sur des bombes de carrosserie pour avoir un trait bien net (sacrilège?)(ndr: oui!). Je ne fais pas des peintures très "spontanées" donc c'est pas très important pour moi. Je trouve que ça donne un bonne pêche à un flop ou à un tag, mais vu que ça n'a jamais été mon fort... Mais c'est clair que certains graffs n'auraient plus beaucoup d'intérêt s'ils étaient fait au skinny Montana, genre Zoow, Kegr, des trucs comme ça...
Les tags 20 ans d'âge, c'est sûr que ça fait plaisir à voir, étant donné que c'est une pratique éphémère, les dernières traces des débuts sont précieuses! Mais je ne suis pas partisan du "c'était mieux avant", certains de ces vestiges sur lesquels vous vous extasiez des fois sont moyens, et s'ils étaient faits aujourd'hui, je pense qu'ils passeraient complètement inaperçus.(nrd: pas faux...)
C'est parfois plus de la nostalgie à mon avis, comme kiffer un vieux morceau parce que ça nous rappelle des trucs...








vendredi 2 juillet 2010

Interview Deenar

Chez Capdorigine on aime les gens discrets, efficaces et qui manient la spray avec classicisme et fraîcheur.




Quel est le premier tag ou graff qui t'a fait te dire "merde ça tue faut qu'j'm'y mette..."


J’ai commencé à m’intéresser au graffiti au début des années 2000, à l’époque la scène était assez active sur Lille à en croire les photos qui circulent sur internet et pourtant je n’en ai aucun souvenir. En fait les premiers graffitis je ne les ai pas vus dans la rue mais dans les magazines, comme nous étions accrocs au hip-hop mes potes et moi nous nous sommes «naturellement» dirigés vers le graffiti. Ce sont donc d’abord les magazines qui m’ont poussé à graffer, puis le reportage Taggers sur la Ville d’Envoyé Spécial diffusé en 2002 m’a conforté dans mon délire, alors que la plupart de mes potes de l’époque avaient déjà lâché ce reportage m’a poussé à franchir le cap et à poser sur mur.












Quels étaient tes "stars" à l'époque?


Comme je t’ai dit à l’époque je ne calculais pas trop la scène graffiti, j’avais la mentalité de quartier et nos seules sorties consistaient à zoner à Euralille et à nous faire recaler à Planète Saturn, des fois, quand nous étions motivés, nous bougions sur République… Il était donc difficile d’avoir un aperçu de ce qui se faisait à l’époque dans la région, ce qui me gène pour répondre à ta question. Pour le peu qui me reste en mémoire je dirai les DNK, les RCM, des mecs comme PAGE et AXE m’ont beaucoup marqué mais de là à les qualifier de « stars »… Les grands du quartier où je trainais mes guêtres m’impressionnaient bien plus.


Tes influences? Graffiti, graphisme, pochettes de disque, etc.


Pendant longtemps mes seules influences étaient issues du graffiti. Je me suis beaucoup inspiré de mecs comme PETAR et CUYTE, PETAR pour le flow, CUYTE pour l’impact. PAGE m’a aussi mis des claques, j’ai essayé pendant un certain temps d’avoir la même vibe que lui dans mes graffitis mais j’ai vite lâché l’affaire…La scène parisienne des années 90 m’a également beaucoup influencé, j’ai toujours cette image « stéréotypique » selon la quelle le graffiti se résume à un bloc simple, des gros contours, un dégradé bleu/rose, situé de préférence pas très loin d’un hall. Pour beaucoup de mecs aujourd’hui, s’ils devaient te résumer le graffiti en une photo, ils te sortiraient probablement un cliché de Martha Cooper ou de Henry Chalfant. Pour moi ce serait plutôt les photos oldschool dans Wild War, notamment le STAES fait par STEAZ et SUBTY vers 1990-91, même si le dégradé bleu-rose n’est pas là c’est très proche de la perfection, de mon point de vue, niveau ambiance. Pour rester sur la scène parisienne et pour en finir avec les influences graffiti stricto sensu des mecs comme COLT et SLICE ont été une source d’influence très importante pour moi, on sent un travail de la lettre non négligeable et malgré tout la simplicité demeure. Je pense que ces influences se ressentent dans ce que je fais, je n’ai jamais trop accroché au délirewild style, même dans les terrains je fais des blocs et utilise peu de couleurs.


Niveau graphisme des mecs comme Alex Trochut, Stefan Chinof, ou encore Alberto Seveso m’impressionnent énormément, j’aimerais avoir leur talent pour capter l’énergie de leurs illustrations et la retranscrire sur mur, tout en restant simple, mais pour l’instant ce n’est pas gagné, je reste assez traditionnel, je ne m’éloigne pas trop des codes. La typographie des affiches de films des années 70 et les Marvel de la même époque font également partie de mes sources d’inspiration.









Le thème c'est "cap d'origine", dis-moi ce que ça t'évoque.


Pendant longtemps je ne peignais qu’à la Montana, vu le pouvoir couvrant je pensais que ça allait être génial, en tout cas mieux que les bombes de Mr. Bricolage avec lesquelles j’avais niqué mon garage, mais en fait ça m’a frustré... Puis PETAR m’a appris la spoliation, j’étais donc moins du côté de République et plus vers Roubaix (Bricorama) ou Villeneuve d’Ascq (Norauto, Leroy Merlin) et là ma façon de pratiquer le graffiti a changé. Avec la Montana je m’adaptais au débit de la bombe et comme le débit est relativement faiblard mes graffitis l’étaient également, c’était mou, il n’y avait aucune énergie or le graffiti était pour moi un exutoire, d’où ma frustration… Avec les bombes pé-ta et le cap noir à pastille blanche j’ai adopté une autre posture, j’étais plus libre de mes mouvements et moins soumis à la lenteur de la Hardcore, ça m’a permis d’aller plus vite dans mes gueu-ta, de sortir la rage que j’avais en moi. Certes ça ne m’a jamais permis d’avoir le flow de PAGE ou de PETAR mais ça m’a tout de même permis de donner une certaine vibe à mes lettres.

C’est intéressant que tu parles du cap d’origine, je n’aurais sans doute jamais envisagé les choses sous cet angle mais je pense que l’utilisation du cap d’origine permet de distinguer les générations. Les anciens serinent souvent le fait que le graffiti « c’était mieux avant », et les mecs de ma génération leurs répondent généralement que seule la nostalgie leur fait regretter le passé. Je pense qu’il faut être plus nuancé. La nostalgie joue surement pour beaucoup dans le regret des anciens mais le changement de matériel n’est pas non plus sans incidence, et le cap d’origine en fait justement partie. Le flow dont je te parlais précédemment est difficile à obtenir avec une Hardcore, a fortiori avec une 94, et même si certains mecs la maitrisent très bien et font de très belles choses je pense que ces bombes contribuent à faire perdre son « âme » au graffiti. Je ne pense pas que tu me contrediras sur ce point mais le graff trop propre, trop net ce n’est plus du graffiti, ça rejoint plus le design, le graphisme. Le travail essentiel dans le graffiti reste le travail de la lettre, la propreté ne doit pas masquer une absence de style mais il ne faut pas non plus que l’absence de propreté desserve le style. Il s’agit d’un juste équilibre à trouver, et cet équilibre est selon moi plus difficile à atteindre avec les bombes actuelles.


Ton avis sur la situation du graffiti dans le Nord? Dans le monde?


Je ne côtoie pas trop les mecs du mouvement donc je serai bien incapable de te donner un avis, sur un plan humain, relationnel, concernant la situation du graffiti dans le nord. Je pense que malgré l’activité intermittente de certains crews dans la région (ST, SA, VR6…) on a longtemps été dans une période de vache maigre tant au niveau quantitatif que qualitatif mais certains signes me font dire qu’on commence à sortir. Tout d’abord au niveau qualitatif avec des mecs comme VASIO et ELVIS qui apportent beaucoup de nouveauté et de vitalité à la scène lilloise. Ensuite au niveau quantitatif je me rends compte que la nouvelle génération bouge pas mal, même si, et ce n’est sûrement pas moi qui les en blâmerais, le périmètre d’action de certains se réduit au périmètre autour de leur quartier. La seule chose qui me laisse sceptique quant aux beaux jours du graffiti à Lille c’est la mentalité des anciennes générations qui ont souvent tendance à rabrouer les nouveaux. Dans tous les domaines le savoir se transmet, c’est même nécessaire au développement d’une discipline et je ne vois pas pour quelle raison le graffiti, même s’il reste une activité hautement « égotryptique », devrai échapper à cette règle.


Concernant la situation du graffiti dans le monde je dois t’avouer que j’ai trop peu de connaissances en la matière pour me prononcer sur la question.


Pourquoi graffes-tu? Pourquoi moins que d'autres, pourquoi différemment.


Comme je te l’ai dit nous étions plusieurs mecs de mon quartier à graffer, la plupart ont vite lâché quand ils ont vu que ça ne rapportait pas d’argent… Pour ma part j’ai continué, je m’y suis accroché sans trop savoir pourquoi sur le coup, et même maintenant d’ailleurs, ça doit être lié au besoin d’évasion, au besoin de liberté. Le graffiti m’a permis d’extérioriser certaines choses et de me détacher de la mentalité du quartier, en gros ça m’a permis d’éviter de faire du sur place et de mal tourner. Aujourd’hui si je continue c’est sûrement parce que ça me permet de me distinguer de la masse, le travail des lettres me pousse également à continuer, ou m’empêche d’arrêter, c’est selon…

Je graffe moins que d’autres car mes proches n’ont rien à voir avec le tag et mes activités extérieures me laissent peu de temps libre, forcément ça limite les sorties graffiti… Je préfère fonctionner comme ça pour ne pas saturer, j’ai envie de faire ça sur du long terme. Je n’ai jamais été le genre de mec super actif pour ensuite tout lâché du jour au lendemain, je préfère rester discret pour pouvoir pratiquer le plus longtemps possible, ça me prive de la fame mais je ne graffe pas pour la gloire ni pour la reconnaissance, je graffe pour moi, si j’avais besoin de gloire je n’aurais certainement pas choisi le graffiti… Sur tous les mecs qui « cartonnent » à Lille aujourd’hui, de combien se souviendra-t-on dans 10-15 ans sans avoir à jeter un œil dans les archives? Comment immortaliser la réputation de mecs ayant pratiqué une activité éphémère ? On se souviendra sûrement de mecs qui s’y sont consacrés pleinement, des mecs comme TRANE par exemple. Mais s’y consacrer pleinement suppose une perte de vie sociale, ou du moins une vie sociale en marge de la société et personnellement je ne suis pas capable de faire ce sacrifice. Même si la vision que j’ai d’un graffiti « parfait » reste conventionnelle mon rapport au graffiti ne l’est pas forcément, « j’avance l’entement mais sûrement...»











mercredi 30 juin 2010

Les "e" corbeaux et l'Hygiène Sociale




























Les mêmes rues, les mêmes voies ferrées, parcourues dix fois, et puis un arbuste en moins, un virage à gauche plutôt qu'à droite, et de nouveaux vieux tags.
Page, Duke, Sleek, Proze, Kato, Danger, Spur, Blade, Aspik, Pones, Acro, Unick, Espack, et les inconnus: Hulk, Sdank(?), Back(Aspik?, "de la Vega"), Obsen...
Et puis les bâtiments qui restent, tels quels, abandonnés, murés, de l'or foncier qui bizarrement vivent vides.