jeudi 5 janvier 2012

Interview OBJECTIFE

Entretien avec celui qui a voulu se présenter sous le nom de "OBJECTIFE", un p'tit jeune de la métropole, à qui j'ai demandé d'éclairer un vieux comme moi sur les motivations, influences et goûts de cette jeunesse que l'on écoute pas assez.





La recette d'une belle métropole?


A chaud comme ça, pour la première question : des villes fleuries, un bon, donc grand réseau de transports en commun(trains, métros, bus confondus), un patrimoine fort, une histoire forte, une culture forte, des villes avec de fortes identités, de la force quoi, un bon club de foot, avec de bons supporters ça va de soi, des concerts de rap, très régulièrement, de bons projets d’urbanisme et architecturaux, du beau temps, mais pas toute l’année, de la ville, de la campagne, du entre les deux, du béton et de la nature, des fleuves et des étangs, la mer s’il y a la place, plutôt chaude si possible, de jolies filles, un All City ("ah non faut voler les bombes"), de bonnes brasseries, quelques pizzerias, un parc zoologique, une frontière pas loin, des kilomètres d’autoroutes, dans tous les sens avec de grands ponts, et des mini-tunnels qui chatouillent au ventre quand on passe en voiture, des expos et des galeries d’art potables, et gratuites, un aéroport pour quand on voyage loin, des pistes cyclables, un système de vidéosurveillance inexistant, des logements pour tout le monde, et des beaux, peu d’impôts locaux, voir pas, quelques policiers, pas trop non plus, et tous en uniforme, des gens sympas, d’autres cools, des arcs-en-ciel, des petits poneys, des nuages en forme de cœurs, plein d’autres choses, et accessoirement une bonne scène graffiti.


Franchement je sais pas trop, j’ai vécu qu’ici sur le long terme, ça me paraît pas trop mal, je m’y sens bien en tout cas. C’est pas Thunder Ten Tronckh(belle référence, j’ai du aller voir à quoi faisait référence ce nom! pourtant je l’ai lu, il y a bien longtemps) non plus, mais je pense que les ingrédients de la recette de notre métropole lilloise sont pas si mal. Tout dépend à quoi on la compare.


Comment as-tu découvert le graffiti?


Dans ma rue.


Pour la petite histoire, il y avait une coopérative agricole. Elle était longée par une voie de chemin de fer toujours en place aujourd’hui mais qui a été réhabilitée en chemin piétonniers(ou "Boucle des 2 clochers"), sur la portion que j’ai toujours connue tout du moins. Ils ont rempli de graviers l’espace entre les deux rails en fait, il y a deux ans environ.




Je n’ai malheureusement que très peu de photos de l’ancienne voie, que j’ai toujours connue abandonnée, pensant qu’elle resterait à jamais dans cet état.

Parce que gamin, c’était quand même un lieu magique, cette flore qui cohabitait avec ces ordures, ces animaux, vivants ou morts, ces morceaux de ferraille, son ballast, les potagers aménagés "illégalement" par les riverains dont le bout du jardin la rejoignait. Et puis c’était aussi le chemin le plus direct entre chez nous et l’école, tout droit, parfois à vélo. Tout un univers, mais il faudrait un article entier pour raconter ce lieu et ses souvenirs.


Ceci dit, pour remonter plus loin encore, et cette fois-ci dans la mémoire de mes parents, des trains de marchandises y circulaient encore dans les années 80. Elle desservait successivement les villes de Tourcoing, Roncq, Halluin puis Wervik (Belgique), et bien sûr les différents dépôts, usines et autres complexes industriels que la ligne longeait. Sans oublier les quelques kilomètres de champs et de campagne qu’elle traverse. Je l’ai jamais longé dans sa totalité, si, sur Google Earth, mais ça compte pas vraiment.



Bref, pour revenir à la coopérative, située en bas de ma rue. Elle avait un quai dont le mur était recouvert de graffitis, de tags, d’une fresque, j’sais plus bien, j’ai juste récupéré ces quelques photos sur un blog.



J’ai tout de suite reconnu le mur parce que mon cousin m’avait expliqué que les petites fenêtres des immeubles étaient réalisées à l’aide de pochoirs. Le deuxième truc qui m’a mit la puce à l’oreille, c’est les blazes, PRATIK, BRAK ADM (des Tourquennois probablement) et surtout F2R, un crew qui avait "cartonné" ma ville, pas dur. Mais j’y reviendrais après à ça.

Revenons donc à cette fameuse coopérative, eh bien, de la même façon que le chemin de fer qui la longeait, elle a fini abandonnée, bien plus tard, car j’ai pu en être témoin. Pour faire vite, parce que les lignes s’entassent là: elle a été démolie, presque du jour au lendemain, à ma grand tristesse, courant 2006 je pense, emmenant par la même occasion les graffitis barbouillant ses murs. Il y a des logements aujourd’hui à la place.


Pour balayer le reste des quelques premiers tags et graffitis que j’ai pu voir «plus jeune», je retiendrais SABRE, FURY, ISER, les F2R probablement. Ils avaient mit la pression sur ma ville, en une nuit, impact garanti! Ça remonte à 2001, 2002, ou même 2003, l’été en tout cas. Je m’en souviens bien parce qu’un type qui conduit les camions à la mairie avait demandé à moi et mes potes, si par hasard, l’un de nos grands frères tagguait SABRE, tout ça parce qu’on avait choisi, aux centre-aéré dans lequel on était, un nom d’équipe similaire dans les jours qui suivaient le carton. Sinon, il y a aussi eu DEBOZE, il avait pas un style trop dégueu en plus, j’ai vu qu’une seule pièce de lui, or, contour rouge, vers Auchan, le reste était des tags ou des throw-ups, contour direct.






Je me souviens de PAICHE aussi, dont j’ai revu des tags l’an dernier aux Moulins de Paris. OBCD(le roubaisien) aussi vers la piscine. GNOME, qui tagguait en binôme avec un certain HANG, ils étaient venus tagguer jusque dans mon quartier. Juste en face de chez moi aussi, sur le petit bâtiment EDF, un tag au marqueur sur la porte à moitié effacé, je l’ai toujours connu, mais j’ai jamais su le déchiffrer. Un pote l’à recouvert d’un tag à la bombe des années plus tard pour me dédicacer et me faire la surprise, parce que je vois la porte de la fenêtre de ma chambre.

Il y avait aussi toutes les pièces le long des fameux rails abandonnés, sur un bâtiment des services techniques notamment, où je m’étais d’ailleurs fait pincer en faisant des tags à la craie, je devais avoir 11 ans, j’écrivais SNOOP(pour Snoop Dogg). J’étais retourné chercher une éponge chez moi après avoir promis au bonhomme qui nous avait chopé de revenir effacer les 2/3 tags que j’avais fait pour qu’il n’appelle surtout pas les keufs, et ne prévienne pas mes parents(Jonathan, si tu lis ça)!




Il y avait aussi le double EDGE noir, devant lequel je passais en vélo, ou en voiture, à la sortie de Bondues direction Roncq, il est toujours là.

Quelques tags PEMA, MOZE en face de la salle de tennis aussi. Je finirais par des persos, un avec une tête de punk signé AM (effacé depuis) que j’ai toujours connu, rue de Lille, à Roncq, et un autre à hauteur de Wambrechies sur la voie rapide, avec des grosses lèvres rouges et une casquette bleue(hein Antoine, "la tête collée à la vitre")




Je suis né au tout début des 90’s, alors le truc était déjà bien implanté lorsque j’ai découvert toutes ces choses, je savais quel en était le but plus ou moins, d’écrire partout quoi! Qu’il fallait choisir un pseudo, avoir des bombes, des marqueurs. Ce qui fait que je ne me suis jamais posé trop de questions à ce sujet en fait. Je me questionnais principalement sur qui pouvait être ces gars, ça me paraissait très lointain comme milieu, comme intouchable, le simple fait d’utiliser une bombe de peinture, de sortir la nuit, le fond m’intéressait bien plus que la forme, tout comme aujourd’hui d’ailleurs.


J’en profite pour lancer un petit appel, à quiconque aurait des photos, ou des infos à propos des lieux et des blazes cités là-dedans.



Où en es-tu dans ton histoire avec le graffiti?


C’est le début, le tout début, enfin, non quand même pas, ça fait une petite dizaine d’années que je m’y intéresse de près. Moitié moins pour ce qui est de la pratique.


Quand je lis ce que des anciens en disent, leurs années bonheur, d’insouciance, de libertés, j’ai pas le sentiment de les avoir vécues, ça voudrait dire que je suis encore qu’au début oui, ou que le graffiti m’amuse pas, m’offre pas cette sensation. Je me base pas non plus par rapport aux recueils du vécu des autres graffeurs, ça serait un peu minable. Je me vois plus comme un spectateur, très attentif, qu’un pratiquant pur et dur. C’est du au fait que je connaisse peu de personnes qui en fasse dans mon entourage, et au fait que je ne m’intéresse pas seulement à ça dans ma vie.

Et puis je suis jeune, donc pas pressé, ni à devenir le "King", ni à payer des amendes. Ca m’empêche pas d’y penser énormément, presque constamment. Et de placer le graffiti comme ma grande passion, un de mes principaux centres d’intérêt. Et puis bon, je sors tout de même assez régulièrement peindre, mais je préfère minimiser le truc, un peu d’humilité ça fait pas de mal, quand tu vois comment certains ont cartonnés, sur des années durant, je suis loin d’être "là", très loin.


Quels sont tes autres centres d'intérêt?


C’est là que ça devient intéressant.


Parce qu’un moment, je me suis quand même demandé, "Pourquoi est-ce que j’aime tant le graffiti?". Petite prise de recul donc. Et je remarque que dans le fond, avec le temps, que c’est plutôt un prétexte à…Dans le sens où depuis que je m’intéresse au graffiti, je m’intéresse à l’Art, avec un grand A. Du Bauhaus à la peinture flamande, en passant par les arts premiers, l’architecture déconstructiviste, le suprématisme russe, l’art nouveau, le fauvisme, etc. Mais pas seulement, je suis de plus en plus passionné par la ville en elle-même, son histoire, son évolution, sa transformation à travers le temps, son urbanisme bien sur, ses éléments.


Le graffiti m’a aussi amené vers la photographie. J’ai eu mon tout premier appareil pour photographier les graffitis que je croisais, pour en garder une trace avant qu’ils ne soient effacés.


J’adore l’Histoire, archiver, investiguer, rechercher. Ca coïncide peut être avec la tranche d’âge pendant laquelle j’ai commencé à m’intéresser au graffiti, à savoir le début de l’adolescence qui est généralement une période ou on se "stabilise", dans nos passions, nos centres d’intérêts. Toujours est il que ça fait effet boule de neige et qu’à chaque fois que je découvre un truc intéressant ça me pousse vers un autre, et ainsi de suite.


Te sens-tu en phase avec ta génération et l'image que la société adulte en a?


Bah pas tellement non. Je suis d’une génération d’assistés, de "tout tout de suite" comme j’aime bien dire. On vit dans les modes, les tendances, les trucs, les machins, les réseaux sociaux, les écrans et les gros logos. On a pas non plus grandi avec! Contrairement à tous ceux qui suivent.


J’essaie de prendre un maximum de recul sur tout ça, même si je peux pas non plus complètement m’en écarter et échapper à mon époque on va dire. Je pense qu’une décennie d’écart, c’est trop peu pour radicalement différencier ta génération de la mienne. Même si en dix ans, ça a plutôt bien évolué, ou régressé selon le point de vue. On reste quand même le résultat d’un système, bien rodé. Je vais pas me lancer dans des grands discours, de néo-révolutionnaire à la noix, puisqu’on sait tous que le spectre des illuminatis plane sur nous de toute façon, que les banquiers sont des voleurs, que les politiques sont des marionnettes, et que les industries pharmaceutiques et alimentaires nous refilent du poison par tonnes.

Sinon pour ce qui est de l’image que la société adulte en a, elle est quand même plutôt exagérée, déformée. On est pas tous pareils! Mais je pense que chaque génération pense du mal de celle qui la succède non?


3 graffeurs que tu apprécies particulièrement? Et pourquoi?


C’est pas facile d’en choisir trois...Je vais tout de même éviter de répondre à la façon des gars de Innercity en déballant une liste de types tendances, et encore moins de parler des mes copains, parce que j’en ai pas beaucoup(qui graffent), et que personne les connait...Je vais être réglo, et pencher plus pour "les graffeurs qui m’ont laissé un certain impact".


Je commencerais par VASIO déjà(si Jérémy me lit, il sera sans nul doute d’accord avec moi), parce que c’est les FH, parce qu’il a son univers à lui, son style, son truc, cette ambiance bling-bling, casino, galactique, ses persos, sa propreté chirurgicale, ses belles lettres, l’équilibre dans ses pièces, ses combinaisons de couleurs, parce que c’est méticuleux, précis, appliqué, parce que c’est beau. C’est aussi parce que depuis que je m’intéresse au graffiti, je croise ses pièces, sur autoroute plus particulièrement, et par chez moi en fait. C’est sûrement pour ça dans le fond qu’il m’a marqué dès le début, me dire que je passais aux mêmes endroits que lui, et inversement surtout. Qu’il y laissait sa trace, son empreinte, qu’il y marqué son passage, c’est le but du graffeur t’façon, ça prend tout son sens ici.





Ensuite KEYZ, parce que c’est les VR6/DNK, parce que là, c’est le côté du graffiti, du tag que j’aime vraiment, publicitaire, grand mais pas gros, lisible, cadré, réfléchi, stratégique, tactique, militaire. Parce que c’est ses toits, son blaze, son parcours, ses places, pour son côté "taggueur solitaire".






Puis NASTE, parce que c’est la MADE, parce que c’est funky, coloré, pétant, ça a du punch, parce que ça change, parce que c’est grand, et gros. Pour ses throw-ups, ses tags, son S enroulé, son E minuscule, ses toits lui aussi, ses contours, qui se décomposent en petits traits, cette spontanéité, sa passion, son dévouement. Parce que c’est hip hop.





Je suis de la "génération Cap Nord", c’est dans ses eaux là que c’est devenu un peu plus sérieux pour moi. C’est un peu comme une petite bible, qui regroupe une bonne partie des noms qui ont bercé mes premiers pas.


Sans Internet à quoi ressemblerait le graffiti?


Etant donné que je fais partie de cette génération "numérisée", baignant dans l’informatique(même si j’ai tout de même connu les cassettes audio, les pogs, les pellicules, les antennes, les disquettes, ou la télévision cathodique), je pense très franchement que sans l’internet, et ça pas uniquement dans le cas du graffiti, mais de manière bien plus globale, rien ne ressemblerait à ce à quoi il ressemble aujourd’hui.


Je vais commencer par l’idée de reconnaissance, ou de popularité. Dans le graffiti, la fameuse "fame", la diffusion du nom. Le net a énormément bousculé tout ça. Comme beaucoup d’anciens et de moins anciens le rabâchent, il suffit aujourd’hui de poster son graffiti sur la toile, les blogs, fotologs, forums le permettent aisément. C’est un sujet qui a été soulevé des tas de fois, bien ou pas bien? Je vais pas me trainer là dessus.

La question est plutôt, est-ce que oui ou non le fait de poster ton graffiti sur le net te "rapporte des points" dans le milieu, dans le jeu? Ou si, il n’y a que le fait de voir (de ses yeux vu) les graffitis qui peut être considéré comme valable pour "attribuer" à un type un certain statut? Tu comprendras que rien que cette reconnaissance, cette fame, elle reste quand même vachement virtuelle, abstraite. Il y a pas de sondages, pas de grand master, décrétant qu’untel est un king ou qu’untel est un toy. Même si je cache pas qu’il y a toujours un avis général qui en ressort.


C’est comme pour les magazines ou les livres t’façon, Paris Tonkar, ou même Subway Art ont fait des jaloux à l’époque. C’est juste une question de "nouveau media" on va dire, mal accepté par ceux qui ne peuvent pas en profiter.


Il y a quand même un truc plus problématique que tu as plusieurs fois soulevé il me semble, et qui là aussi n’est pas seulement propre au graffiti. C’est la copie, le pompage, des styles, des phases, de tout, colporté et appuyé par les vagues, les modes, les tendances. C’est clair que c’est pas nouveau, mais internet multiplie ça par mille et ça rejoint un autre thème qui est celui de l’accessibilité. Internet à tout rétréci, et de la même façon que des types l’ont eux même déjà rabâchés, il est possible à n’importe qui de peindre avec tel style, qui vient à la base de l’autre côté du globe. Pour l’instant c’est encore assez neuf dans le fond tout ça, même pas dix ans, alors peut être qu’avec le temps les gens iront plus loin, faisant des combinaisons de styles plus complexes ou autre, sans copier -coller bêtement. Ou peut-être même que certains styles ne pourront être localisés que sur internet, le "style internet"! Affaire à suivre donc.


Mais malgré tout, même si comme pour la fame ça enlève une part de vraie, pourquoi pas se servir? Ca fait partie du truc maintenant t’façon. Est-ce que c’est légitime ou non? Ou faut-il ne s’influencer que des graffitis que l’on croise en vrai? Ca permettrait de faire évoluer les scènes, de façon très localisée, comme avant, chacune ayant sa propre identité esthétique notamment, mais ça tournerait peut être en rond à terme? Questions ouvertes donc ; il est peut-être un peu trop tôt pour répondre à tous ça, ou trop tard.


Puis c’est comme pour tout, la photo, la musique, tout le monde en fait, tout le monde est photographe, tout le monde est musicien, tout le monde est artiste. La barrière est tombée dans ces domaines bien plus accessibles(car mieux acceptés que le graffiti, on ne réexpliquera pas pourquoi, et aussi car le graffiti, c’est quand même rempli de vieux types aigris(humour bien sur)).


Tout ça pour dire que ça permet aussi à beaucoup, car l’internet mise aussi beaucoup sur ça, se créer une certaine identité, virtuelle certes, mais plutôt bien reçue, et même approuvée par l’opinion en générale, alors le graffiti y échappe sûrement pas.


Pour recadrer ma réponse par rapport à ta question je dirais que sans internet le graffiti serait plus underground, moins accessible c’est sûr, comme avant, dans le temps(quand je suçais encore ma tétine). Ca serait pas mauvais en soi, dans le sens où les générations précédentes qui n’avaient pas internet à leur disposition étaient quand même là. Les styles évoluaient malgré tout. Ca tagguait de partout. Et ça éviterait à certains de s’y mettre en faisant n’importe quoi. Car cette profusion d’infos devrait être utilisée pour se différencier justement, mais non, il faut qu’on tombe dans la facilité(heureusement pas tout le monde).


C’est pareil pour ce qui est de la culture, l’histoire même du mouvement, c’est pas compliqué de savoir d’où ça vient, quels sont ses codes, même Wikipédia nous l’explique, mais non, faut qu’il y en ait qui recouvrent les vieilles pièces, qui se mettent à tagguer "TRANE". Ce qui est plutôt étonnant en fait, c’est qu’à l’heure où le truc est mille fois plus accessible qu’il y a 15 ans, il est malgré tout pratiqué de manière beaucoup moins respectueuse, moins passionnée, moins authentique. C’est logique dans le fond, les gens survolent les sites, les magazines, et croient tout connaître, alors qu’avant il fallait vraiment s’y investir pour en comprendre les règles, les codes, les valeurs, je me trompe? C’est l’impression que j’en ai à travers mon regard de jeune rookie en tout cas.


Bref l’internet c’est du bon et du mauvais, on l’aura compris. Le tout c’est de s’en servir à bon escient, pour faire avancer le schmilblick, et pas comme un truc de fainéant, parce que c’est clair que ça facilite tout.


Une bonne photo c'est quoi?


Une photo qui raconte une histoire. Qui questionne. Faut pas qu’elle soit juste belle. Elle doit avoir une fonction un minimum pédagogique si tu vois ce que je veux dire. Elle doit parler. Les meilleurs exemples sont dans le photojournalisme je pense. Je vais t’en faire un portrait robot, où j’additionne les éléments un à un : ton boulot c’est de me trouver avant la fin du mois un lieu similaire, et de le photographier bien sûr.


Mois de janvier donc, un dimanche matin, quelques nuages pour habiller le ciel bleu, plein soleil, un vent frais, pas plus de dix degrés au thermomètre, entre Halluin et Haubourdin, ou entre Détroit et Washington, une vf abandonnée, avec deux ou trois frets, abandonnés eux aussi, qui stationnent sur des vieilles voies de garage sur la gauche. Quelques vieilles bâtisses, de part et d’autre de la voie, plus grandes, plus hautes du côté droit si possible, genre usines désaffectées, en tôles vieillissantes, rouillées, usées par le temps, ou en briques, rouges bien sûr, entre lesquelles la mousse, les mauvaises herbes, et le lierre s’installent. Des grandes enseignes, fixées sur le haut des grands murs des usines, avec des typos grasses, imposantes, comme la "Force 59"(qui a perdue son F, et la moitié de son O) à Tourcoing, sur la Chaussée Fernand Forest, en face du Brico Dépôt. La rosé matinale, des hautes herbes, des buissons tout ça, qui envahissent une partie des rails. Un petit poste d’aiguillage, ou un tunnel, comme ceux sur la Petite Ceinture, en arrière plan. Des oiseaux perchés sur des fils électriques environnants aussi. Aucun tag. Aucun graffiti. La photo elle, prise de face, parfaitement, parallèle, linéaire, cadrée au poil, équilibrée, centrée, simple, banale. A l’argentique si possible, pour le grain, pour la qualité tout bêtement. Parce que ça force à en prendre deux voir trois clichés, pour être sur de l’avoir bien réussie. Pour l’attente que le développement procure, pour la surprise. Et parce que c’est trop hype l’argentique!...


Le meilleur endroit pour manger dans le monde?


Ecosse, Croatie, Toronto, Belgique, Catalogne, Mali, Bavière, Dijon...Je suis pas difficile, tant que c’est saturé de graisse, j’avale.


Je retiens tout de même un fameux rougail saucisses, dégusté chez une vieille dame, dont j’ai plus le nom en tête. C’était à Cilaos, un bled vraiment magique, en plein cœur de L’île de la Réunion(Félix si tu passes ici, je te filerais le plan). Elle nous avait hébergé moi et mon clan dans sa case remplie de breloques, et toute humide. Le temps d’une nuit, gratuitement. Bons souvenirs.

L’île de la Réunion, pour y avoir été déjà plusieurs fois, je la conseille vivement. Les tropiques, une ambiance "à l’africaine", 25° en moyenne toute l’année, les plages, le surf, les filles, les montagnes, les cyclones, les randonnées, une flore et une faune hallucinante, la jungle, les forêts de pins, son volcan bien sûr, encore en activé, l’endroit le plus cosmopolite que j’ai eu l’occasion de visiter.



Freud c'est pas un peu gros toutes ces conneries?


A défaut d’avoir compris la question du premier coup, et aussi parce que l’épreuve de philo au bac, c’est déjà loin derrière, je vais répondre à chaud, comme pour la toute première.


Sur France Inter donc, à bord de la voiture familiale. Sur le parking du garage Ford de Colmar, une émission sur l’interprétation des rêves, Freud en vedette.


Quelques années plus tard, retour d’Espagne, à hauteur d’Orléans, dans la voiture familiale toujours, France Inter toujours, une émission sur l’inconscient, Freud en vedette.


Alors, soit on change de voiture, soit je pars plus en vacances, soit j’écoute Skyrock. Mais ce qui est sûr c’est que pour un type mort il y a 80 ans, il est là.


Mais un moment, je pense qu’il faut un peu se libérer, arrêter de trop réfléchir, vivre tout simplement. Alors oui, elles sont plutôt vachement grosses toutes ces conneries. Point.


J’en profite pour passer le bonjour à Jérémy, Antoine, Jonathan, Victorien et Yoann aussi, parce qu’ils savent de quoi je parle tout au long de cet interrogatoire. Parce qu’ils ont foulé ces lieux en même temps que moi, et pour les mêmes raisons. Parce qu’ils étaient là dès le début.




Vous pourrez checker www.objectife.blogspot.com d'ici quelques jours, à toi de le maintenir à flots dans la jungle impitoyable des "daily graffiti diaries"!


9 commentaires:

  1. ça devient rare une réflexion globale comme celle-ci, ça redonne de l'espoir...

    RépondreSupprimer
  2. paiche / peche c'est un fille des T7P

    RépondreSupprimer
  3. Sacrée maturité pour un "p'tit jeune"...

    RépondreSupprimer
  4. tes photos s'affichent pas en grand...

    RépondreSupprimer
  5. T'as toujours pas trouvé de solution pour agrandir les images ? C'est quand même con...

    RépondreSupprimer
  6. c'est clair belle maturitè
    comme quoi y'a pas que des petits cons chez les jeunes
    mais bon on a pas tous les capacité d'allez en BAC

    Sympa les photos

    RépondreSupprimer