vendredi 9 décembre 2011

Interview ONEA










Quand j'étais à Paris, un nom apparaissait souvent seul, et toujours sur des murs mitoyens, apposé le long d'une échelle à 30 mètres de haut ou suspendu dans le vide à la faveur d'une démolition.

"ONEA".

J'aimais bien le nom, les spots, l'ambiance qui se dégageait de tout ce que je voyais de lui. J'imaginais un taggueur solitaire, de la race de ceux que j'apprécie le plus. Je ne l'ai jamais rencontré, mais je voulais vraiment en savoir plus, alors j'ai joué de mon maigre carnet d'adresses pour parvenir à lui, via mails seulement, malheureusement.

Je commence d'ailleurs à éprouver les limites de ceux-ci, ou alors sont-ce celles de mes interlocuteurs...

Bref, voici notre discussion et quelques photos.



Ton proverbe préféré?

Onea soit qui mal y pense pff ;)

J'avais même pas pensé à ça une seconde en posant ma question, je le jure.

Le graffiti n'est-il pas meilleur quand on le fait seul?

Le gang bang mural c'est pas mal non plus. C'est surtout une histoire d'organisation, je peins souvent en speed en 1h30 max, s'il faut attendre untel ou autre la session est foutue. Après je kiffe aussi retrouver les potes, peindre tranquille, picoler & BBQ c'est cool mais après il faut la journée.



Paris en 2011, c'est comment?

Cher.

Niveau graff on peut dire qu'on a de la chance y'a pas mal de spots et ça bouge bien, oldschool-newschool ça motive.

D'ailleurs ces années 2000, n'ont-elles pas été la plus grosse arnaque de l'Histoire? On nous promettait des voitures volantes, des robots, l'Espace à portée de tous et résultat?!? rien, le néant culturel et social.

Bilan de la première décennie des années 2000: plus de pauvres et d'écart entre les gens, mondialisation piège à cons et pour la culture vive la standardisation et les stéréotypes élitistes. La minorité dirigeante veut faire chier le pékin. De toute façon tu vois le président c'est déjà de la science fiction.




Le chrome/noir n'est-il pas la définition même de la classe promue par Georges Abitbol?

Ouais ça me rend limite nervous break-down.

Je sens une pointe d'ironie...

Venons-en à ce qui me paraît être ce qui fait de toi ce que tu es: les murs mitoyens. Voir son nom planer sur un papier peint ultra-kitsh est une image magnifique. Rôder là où les gens habitaient, sentir un peu de leur âme...D'où t'es venu cette passion pour ce support bien précis? Comment se passent les repérages? Quelles sont les meilleures anecdotes? Envoie la poésie là, livre-toi.

Trainer dans des terrains abandonnés c'est un kiff, t'es tranquille, t'as d'la place et des murs vierges avec des jolis fonds à barbouiller. L'état de délabrement de certains bâtiments rend le jeu parfois périlleux ça donne plus de piquant au truc, après se dire que des gens étaient peut être là y'a quelques semaines encore ça fait bizarre, les restes de leurs vies abandonnés en urgence on imagine les mecs avec les pelleteuses en train de foutre les familles dehors avec les flics, bonne ambiance, et puis ça gène pas les bailleurs de louer des appart insalubres.

Parfois tu tombes sur des squatts : sans papiers, putes, tox...j'ai jamais eu d'emmerdes, faut sentir le truc aussi, si ça craint vraiment vaut mieux pas trop chercher.

En général tu peins tranquille, mais ça prend du temps: trouver les spots, entrer, checker les lieux, parfois ça rentre tout seul d'autres fois faut revenir, faut pas être trop impatient. Apres c'est bien d'avoir de la place et des murs vierges pour faire ton délire et le résultat final si tout se passe bien c'est un graff volant, c'est surréaliste.

Et ce que je(c'est le questionneur qui parle) trouve le plus mortel(sic) c'est qu'en général ils construisent par-dessus ton graff, donc le cryogénisent en quelque sorte. Dans cent ans il réapparaitra à nouveau à la faveur d'une nouvelle démolition, et il t'aura ainsi survécu. Génial non?



Tes lettres sont, il faut dire ce qui est, parmi les plus utilisées et les plus faciles de l'Histoire du graffiti. Alors, comment fais-tu pour te démarquer?

Regarde le cinéma , c'est toujours les mêmes scénar...

Tu fais partie d'un crew fortement médiatisé, pourtant toi tu es resté discret, peu mis en avant, pourquoi? Tu as un bon nombre d'années dans les mains si je ne me trompe d'ailleurs?

Les VMD c'est une grande famille, avec des frères des soeurs et des cousins plus ou moins éloignés mais tous en contacts. On a des styles et une approche très large du graff, certains sont là depuis super longtemps, ont développé des contacts et essayent de vivre de ça, je trouve ça vraiment fort. J'ai jamais cherché les contacts et tout ça. J'aime bien peindre dans des lieux déserts donc pas trop vus non plus. Tu peux pas tout faire, peindre et démarcher des galeries.

Dédicaces VMD DKA TBK R(à l'envers!)

Bravo pour ton blog, j'adore les spectres.



5 commentaires:

  1. "(...)via mails seulement, malheureusement.

    Je commence d'ailleurs à éprouver les limites de ceux-ci, ou alors sont-ce celles de mes interlocuteurs..."

    Tu peux expliciter?

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  2. Certaines personnes n'aiment pas trop s'épancher sur leur vie, taper longuement des phrases compliquées, ou tout simplement parler de graffiti.

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  3. Ben là encore, l'interview est assez limitée, c'est con...le mec a vraiment un bon trip. ça me fait penser à Céki de Rennes, qui était à fond dans ce délire des murs mitoyens, le repérage, l'exploration, le temps qui passe, et un beau jour, la surprise...c'est très malin, perso, poétique comme démarche.
    Mais là, c'est pas une histoire de raconter sa vie, ou parler de graffiti...tu peux parler de sensations, de la vie en général, tout en gardant ta vie secrète. C'est surtout que les gens n'aiment pas trop écrire, tout simplement.

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  4. "Le graffiti n'est-il pas meilleur quand on le fait seul?"
    tellement de choses à répondre sur une question comme ça...

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  5. Envoie-moi donc une réponse à cette question?

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