Ta couleur préférée? Parles-nous des différentes marques de bombes, de couleurs et pressions précises, chez Marabu, Belton, Krylon...j'avais lu la légende d'une photo d'un de tes panels où tu évoquais la trop forte pression du blanc Krylon pour les lights une fois...de caps, d'odeurs, des trucs de geeks de la spray quoi.
Celles de l’arc-en-ciel.
"Underrated", à qui tu penses à l'évocation de ce mot?
Le but du graffiti, c’est justement de se faire un nom, par tous les moyens possibles et imaginables, en prenant en compte l’évolution, par exemple Internet. Si un nom te semble être sous-estimé, pour moi c’est juste qu’il n’a pas su se démarquer par le nombre comme TRANE, par l’originalité de son style come FUZI ou par des stratégies de communication comme EYONE (je menace les uns, ça fait parler les autres).
Personnellement, au début des années 90 je donnais mes photos, à 1TOX ou XG, mais c’était toujours des noms undercovers donc pas vraiment de reconnaissance direct, plus tard, je pense avoir été boycotté par la presse graff française. Je ne parle pas de la presse graff étrangère, ils ont assez de boulot dans leurs coin, quoique certain writers français que je ne citerais pas ont été over-publiés par copinage et mytho, par rapport à leurs tafs réels, ou plutôt publié par copinage ce qui créait le mytho et tous les autres les veulent aussi…
TRANE n’a quasiment jamais été publié et c’est le plus connu de tous les temps, c’est ça le graff.
Tu fais des expos par opportunisme, curiosité ou réelle envie?
Je suis passé à la toile par continuité logique, y'a pas de hasard, ce support a était trouvé y'a des siècles voir des millénaires, par des artistes qui au départ peignaient ou gravaient la roche, ensuite les murs de temples ou d’habitations(y'avait pas encore de train!)
C’est le compromis parfait pour pouvoir déplacer ta peinture, essayer de la faire vivre au maximum dans le temps.
Je déteste le mot "pérennisé", que j’ai entendu de la bouche d’un recruteur de taf : "...de façon pérenne…" ou je sais plus quoi, fils de pute, t’es un clochard! Arrêtes de faire semblant de savoir parler…
Donc après des années de peinture illégale, éphémère, je suis passé sur toile sans calcul, naturellement, je ne savais même pas si du "graff sur toile" ou des œuvres sur toile de graffeurs se vendaient. C’était un besoin, la suite logique de mon parcours, mes premières toiles étaient des reproduction d’après photo d’ambiances ferroviaires, plutôt tournées vers PSL, et le résultat était surprenant. J’ai de suite voulu montrer mon taf, je l’ai fait dans un petit musée de cambrousse, en nord-Auvergne, dans une expo de modélisme ferroviaire, aucun graffeur, je parlais avec des chauffeurs de PSL(je ne me suis pas présenté en tant que vandale mais en tant que passionné de train), l'un me disait : "Celle-ci, c’est à Herblay ou à Chanteloup !", et j’ai eu des super retours, les classiques "Trop bien fait! c’est super…", et des plus techniques comme : "y’a unnnneuh lumière dans vos peintures…"
Ensuite une expo collective à Paris avec que des taggeurs, et là, le plaisir de surprendre son monde, ce n’est pas comme faire un train, il est vu mais tu ne vois pas la réaction des acteurs du move, là oui…
Après si ça vend, c’est tout bénéf'…
Donc, suite logique, plaisir de peindre et envie que mon taf soit vu, ce qui rejoint l’esprit du graffiti: se faire un nom tout en se faisant plaisir à peindre.
Après tu peux te branler à peindre des supports « inédits », tôle, verre, etc. mais ça n’est jamais que de la branlette.
Je repense à l’intervention de SKKI, dans WRITERS : "La toile, je voyais ça comme quelque chose de médiéval…"
Intéressant…mais il a eu à se poser ces questions tôt, au vu de son entourage, sa concurrence, LOKISS ou BANDO qui sont des personnes cultivées avec qui il a forcément été confronté à l’idée de peindre sur toile tôt. Ils connaissaient l’histoire de la peinture avant "d’entrer en graffiti" et dans le graff, ils savaient que les pionniers étaient passés sur toile. Tu me diras je l’ai vu dans "STYLE WARS"(en 1992) que les writers passaient à la toile, mais ça ne m’a pas parlé, pas plus que JONONE dans Envoyé Spécial.
Je ne me souviens plus de l’année de sortie du livre "Coming from the subway", je l’ai péta direct, bon j'le matais mais sans plus, je préférais les textes du début, sur l’histoire du métro, les premiers "back-ground clouds", "3D", "top-to-bottom"…la putain de compétition d’enculé du début.
Aussi, je tiens à signaler la différence entre mon parcours et celui de beaucoup d’acteurs de la scène graffiti française actuelle, dans le sens où depuis que j’ai commencé à faire des graffitis, je n’ai jamais arrêté, je n’ai jamais douté, pas une année sabbatique, pas de snow, de skate, d’informatique, de boxe(ou autre karaté, MMA), de tunning, de taf, de vie de beauf…"Only one life", j’ai une seul vie celle de la peinture ! là, je parle d’anciens, qui ont fait du graff pendant trois ans, qui ont arrêté et qui revienne par nullité de vie !
Penses-tu que les "acheteurs" soient vraiment "sensibles" aux œuvres qu'ils achètent? Ou que c'est uniquement de l'investissement, et ceux depuis les débuts du "graffiti-art"?
Y'a forcément de tout, ceux qui vont vraiment tomber amoureux d’une peinture, ceux qui vont se faire manger le cerveau par un bon vendeur, ou par un artiste qui a de la tchatche, les investisseurs pur et simple, deux de ces solutions ou toutes à la fois.
Comment passe-t'on des années UV-TPK à ton quotidien d'aujourd'hui? Trouves-tu la même adrénaline, la même excitation dans autre chose? Ou as-tu sombré dans une dépression sans retour?
Aujourd’hui, j’ai un enfant à charge, c’est pas facile, je parle pas au niveau financier, je parle du côté éducation. J’ai bien aimé une phrase du photographe de "Salut les copains"(Jean-Marie Perrier), entendu récemment dans une interview à la télé. Il disait: "Quand on a le culot de mettre au monde un enfant, il faut s’en occuper vraiment, ou à fond", quelque chose comme ça.
Je ne suis pas du genre à déprimer, si il ne fait pas beau, je peux avoir un p'tit coup de mou, mais voilà tout, y'a tellement de chose à voir, gratuitement, des livres(en bibliothèque), de la musique(radio), même à la télé je trouve des trucs intéressants, je n’ai pas besoin d’aller au ciné, au resto, dans des expos(j’essaye de boycotter au maximum le commercial), il me suffit de marcher dans la ville, la campagne, pour me nourrir de mon environnement, je ne m’ennuie jamais, et je ne peins pas forcement tous les jours, je dessine très peu…
Je rêve tout le temps, et pour ça tu n’as pas besoin d’argent, c’est gratuit. Tu me lâches au milieu des steppes sibériennes, je ne déprimerais pas pour autant…trop de chose à voir, à faire!
Ton TOP 5 musical?
EPMD les 5 premiers, Public Enemy "It takes a nation..."et "Fear of a black planet", BDP "Criminal minded", "Edutainment", "Sex and violence", Eric.B & Rakim "Paid in full"(c’est le seul que je retiendrais d’eux), De La Soul "3 feet high and rising","De La Soul is dead" et les morceaux "Egotrip" et "Stakes is high".
Wu Tang Clan "Enter the 36th chamber" et les premiers solos, Geto Boys "The Geto Boys", "Resurection", "Mr Scarface is back", Willie D "Play witcha mama”, Dr.Dre "The chronic"(qui est un putain d’album et pour dire que je kiff Snoop, DPG, RBX, The DOC), Mac Dre "Young black brother" et "Al Booboo", 2 Live Crew "Nasty as they wannabe", Masta Ace "Take a look around", Above The Law "Black mafia"...The Click, les 3, E40 les 8 premiers...
Ensuite le Reggae, je suis beaucoup moins connaisseur, à une époque mes potes étaient à fond, on allait en sound-system (Black Dragon, Lord Zeljko…)
Je trouve géniale cette musique née sur cette petite île, la Jamaïque. Faut-il remercier les esclavagistes européens des 16-17-18-19ème siècles? Pour le jazz, le R'n'B, le rock, le reggae, le rap, et toutes les autres musiques afro-caribéennes, afro-latines..?
Dans le rock, la variété(pop, commercial), le classique, je trouve pleins de trucs intéressants et surtout vraiment mortels!
Tu as récemment bien démonté le livre Paris City Graffiti, lui reprochant en gros un amateurisme et un laisser-aller à la limite du foutage de gueule. Je rapproche ces quelques lignes pamphlétaires d'une chronique récente de ton blog, où tu dis avoir shooté 17 pellicules un jour, uniquement de tags...T'as l'air d'être, comme moi, un historien pointilleux. C'est l'Amour du graffiti qui se manifeste violemment?
Le projet Paris City Graff comme il a été réalisé ne m’intéresse pas, je ne dirais pas un amateurisme, c’est surement leur vision (restreinte) des choses, ce n’est pas la mienne et je le dis, je veux voir des projets intéressants, intelligents, son livre comporte très peu de texte, donc c’est un livre de photos, mais depuis quand dans un livre de photos on ne met pas en valeur les photos, par des pleines pages, ou par une mise en page astucieuse ?
Un exemple et l’anecdote qui va avec: au début de son livre, dans la partie "Rue" qui déjà est bizarre(moi j’aurais séparé les rues de Paris, celles de banlieue et j’aurais évité de mélanger avec des peintures autorisées), il y a une vignette en haut à droite d’une page de droite, des graffs "Desy" et "3HC" sur les murs de deux bâtiments de sa cité "La Muette" à Garges-lès-Gonesse dans le 95.
Au printemps 1992, j’ai un peu bougé avec Desy, je l’ai emmené quelques fois faire Pontoise (les trains de GDN) Un jour je vais chez lui à Garges, à un moment, il devait aller voir quelqu’un dans un autre bâtiment et me demande de l’attendre au milieu de quatre gros bâtiments, sur lequel y'avait des fresques à lui, des graff mortels. Moi je commençais seulement à faire des graffs "potables". Là, y'avait plusieurs lettrages: un "Desy", un "3HardCore" (pour 3HC), des b.boys dont un avec une quinze, trop bien fait, le tout vraiment mortel. J’étais en train de matter les graffs, quand une vingtaine de jeunes déboule, y’en avait de toutes les couleurs, ils avaient entre 12 et 16ans(j’en avais 15) et il y en avait un plus vieux que les autres, peut être 18-20ans, plutôt blanc, "le chef", qui m’interpelle et me demande ce que je fais là. Je lui dit que je suis avec Desy et que je l’attend, il me répond : "Ah! T’es avec T…, ça va, t’as de la chance, si t’avais été tout seul, ça aurait été relou pour toi…"
Ensuite j’ai perdu de vue Desy, mais je gardais dans un coin de ma tête ses graffs que j’espérais revoir un jour en photo. Ça y est, je les revois mais en vignette de merde, on voit rien c’est trop petit, on ne peut pas voir la puissance de ces peintures, voilà un exemple de gâchis d’archives!
Je ne comprends pas son livre, quand je le regarde, il me file la gerbe, ce n’est que mon opinion.
Pour revenir, sur ce qu’a dit COMER sur un forum, je répondrais ici :
"La maturité aurais voulu que tu fasses un livre intéressant, j’ai ton numéro de tél, pas parce qu’on est copains, mais parce que tu es venu vers moi pour ton projet(je ne t’ai d’ailleurs eu au téléphone qu’une seul fois), si j’ai envie de dire ce que je pense de ton livre en public, je le fais, je te dois rien, commence par me donner les photos de moi que tu as gratté à droite à gauche, comme tu l’avais promis, et penses à faire valider aux personnes concernées les photos que tu mets d’eux !"
Si je réagis de cette façon sur ce livre, c’est surement parce que j’attendais, comme beaucoup de ceux qui ont donné des photos et des textes, un ouvrage à la hauteur, fait par un passionné. Je n’aurais pas pris position s’il s’agissait d’un livre "carotte" de Noël, fait par un éditeur commercial, comme il y en a eu des tonnes.
Pour ce qui est d’être un historien, c’est certain, j’en connais un rayon sur le sujet, ça m’intéresse de savoir qui a fait quoi, à quelle époque, avec qui, avant qui, pourquoi, comment, quelle bombes, achetées, volées…
Je vois le graff dans sa globalité, quand certain ne se soucieront que d’eux-mêmes, moi je me soucie de moi bien entendu mais moi dans le graff parmi tous ses autres acteurs. C’est pour ça qu’à la fin des années 90, je me suis réveillé et j’ai commencé à shooter un maximum de tags, graffs, spectres…pour l’histoire.
Au collège, ça devait être en 3ème(tiens à la même période que l’anecdote chez Desy), après un conseil de classe, mon prof d’histoire-géo, m’a dit : "Mr. ….., je ne comprends pas, avec votre professeur d’anglais, on est les seuls à vous défendre, tous vos autre professeurs vous cassent…"
Je n’ai jamais rien foutu en cours et j’avais 17 de moyenne en histoire-géo, juste en écoutant le prof et en feuilletant les pages du livre, l’histoire c’est mon kiff !
Les voyages n'ont pas l'air d'être ta grande passion, pourquoi? Paris te suffisait comme terrain de jeu?
Apparemment, tu n’es pas au courant, j’ai faits de nombreux voyage(j’en parle pourtant dans l’itw de Gossip-graffiti)
A commencer par Amsterdam(des dizaines de fois, du panel au whole-car). Dortmund, pas mal, un bon p'tit kiff, les S.trains avec des graffs Sento, Ket, Rio, Wut...à côté des miens…et les bombes dans les magasins Praktiker(open-bar), Copenhague plusieurs fois, un inter-rails sud Europe, Barcelone, Rome, Athènes…et encore de nombreux voyages à Rome, voir le livre « All City Writers".
Tout ça pour vivre en vrai des réseaux saturé de graffs ! (relire l’itw gossip graff) et le plaisir de s’ouvrir à de nouveaux horizons.
Toi et Kiss sont deux des noms que j'ai le plus vus sur frets depuis 10 ans, vraie passion ou exutoire?
Quand j’étais sur Paris (et région) je ne calculais pas les frets, j’étais trop dans mon trip "Subway Art", quand j’ai bougé à la campagne, il y avait bien des trains, mais c’était fini, j’étais parti pour justement mettre un terme à ce cercle vicieux, plus le fait que les trains étaient modernes, futuristes, pas à mon goût. Alors le fret, c’était un bon compromis, ambiance podé avec des dizaines de trains dans tous les sens, la rouille, pas trop surveillé et ça roule(très rarement cleanés), quand tu arrives dans un dépôt, il y a de la lecture…c’était un vrai plaisir, j’en ferais encore si je n’avais pas de vie de famille.
J’espère bien faire plusieurs livres, sur moi, le métro de Paris, sur PSL…
J’ai envie de partager mes archives, j’ai pris des photos pour la mémoire collective.
Chaque chose en son temps.
J'ai toujours préféré les tags aux graffs, je trouve qu'on ressent plus la personnalité du mec, je rapproche ça d'un point que tu évoques d'ailleurs, les samples. Pour moi un tag c'est le sample de la pièce, c'est le pur jus, le suc. Un tag tu le rates tu le rates...C'est One Shot, tu gicles tout c'que t'as dedans, c'est vraiment la recherche ultime de la perfection, comme le geste dans les arts martiaux. "Shoot To Kill". J'me branle trop le cerveau ou t'es d'accord?
Je suis entièrement d’accord, tu as tout dis, si tu te loupes c’est mort, le graffiti au départ, c’est le tag, après pour se faire remarquer, pour sortir du lot, les pionniers ont fait les graffs…mais le tag reste la base, je déteste les graffeurs de terrains qui ne savent pas tagguer, pareil pour le flop, si t’as pas un bon flop, t’es pas un bon writer, c’est foutu et très peu en ont un beau mais surtout original!
Une question pour moi?
Que penses-tu de moi?!?
pour ceux qui ne l'aurait pas compris, pour moi il est impossible de classer 5 albums, artistes, chansons, au top, il y a trop de bonne chose en musique, maintenant EPMD font effectivement parti de mes artistes préféré...
RépondreSupprimerjolie update, les photos, les textes, tout est bon.
RépondreSupprimeret pour y répondre avec ton ptit jeu des titres de chanson,
RépondreSupprimerje dirais pour un premier temps,
SEX AND VIOLENCE !
puis,
MONEY AND THE POWER !
Do It N°1...
RépondreSupprimerBonne interview car bonnes questions et...bon choix d'interlocuteur. On sort enfin de la scène lilloise. J'ai rien contre elle évidemment, mais là ça ouvre d'autres horizons. Vivement les prochaines.
Je sais je suis un peu monomaniaque mais j'aurais aimé plus de développement sur le fret.
A propos des futurs bouquins mon idéal serait un ouvrage sur rap, kiss et fuzi sur fret...tofs, ambiances, textes...etc. Il n'y a jamais eu en France un amour assumé pour les trains de marchandises, "support de tafiole". Pour moi ton nom et ceux de tes acolytes ça m'évoque tout d'abord les bâchés, les tombereaux, les trémies, parce que j'ai vu des centaines de fois vos noms dans les gares de triages aux quatre coins de la France. Je ne suis pas un enfant de la banlieue parisienne...c'est là toute la force du fret. Au milieu de toutes les merdes que l'on trouve sur ces wagons délaissés par les graffeurs en général, les tags et flops que j'y voyais ajoutaient à leur cachet et me laissaient penser que, quelque part, d'autres gars portaient le même intérêt que moi à ce support.
je me suis mangé quelques JIEM, ça faisait partie des bonnes lectures, quand j'y allait, à l'époque y avait pas grand chose d’intéressant, je n'y vais plus, mais dernièrement j'ai voyagé en train(rare pour moi) et j'ai vu pas mal de chose, j'ai l'impression que ça bouge...
RépondreSupprimeraurait-on supprimé un de mes commentaire?
RépondreSupprimerC'est ce site de merde il m'en a sauté pleins...tout comme il me décale régulièrement la moitié des textes, ou pendant une semaine aussi des photos qui disparaissent...relou. Si tu t'en souviens tu peux le renoter.
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